Yoani dans Le Devoir

Posté par vmozo4328 le 6 novembre 2010

Deux jeunes femmes libres

Louis Cornellier   6 novembre 2010  Livres

La blogueuse Yoani Sánchez a choisi, à ses risques et périls, d’oser, ce qu’Internet, dont elle n’ignore pas les vices, lui permet de faire.<br /> » /></p>
<p align=Photo : Agence France-Presse

La blogueuse Yoani Sánchez a choisi, à ses risques et périls, d’oser, ce qu’Internet, dont elle n’ignore pas les vices, lui permet de faire.

Yoani Sánchez est une jeune femme libre et courageuse. Née à Cuba en 1975 et diplômée en philologie hispanique de l’Université de La Havane, elle a vécu en Suisse pendant quelques années. En 2004, elle choisit, par amour pour son peuple, de retourner vivre dans son pays d’origine. Trois ans plus tard, écœurée par le régime dictatorial des Castro qui tue «les rêves d’une société meilleure», elle crée le blogue Generacíon Y, dans lequel elle s’exprime avec une étonnante franchise.

Aujourd’hui, Yoani Sánchez est une vedette. Son blogue, traduit en 19 langues, est lu par des millions de personnes partout dans le monde et a remporté plusieurs prix internationaux. En 2008, le magazine Time a inclus la blogueuse dans sa liste des 100 personnalités les plus influentes. Quand elle écrit à Barack Obama, celui-ci lui répond.

Cuba libre. Vivre et écrire à La Havane est la version française et papier de son blogue. Il contient des entrées qui vont du 18 mai 2007 au 29 avril 2010. «L’auteure, écrit Víctor Mozo, un de ses traducteurs, vous prend par la main et vous fait entrer dans la réalité parfois inimaginable qu’impose un système qui se veut un exemple d’abnégation et d’héroïsme urbi et orbi, mais qui n’est en fait qu’un théâtre de l’absurde à la Kafka.»

Avec un ton familier et chaleureux, la jeune mère de famille, mariée au journaliste dissident Reinaldo Escobar, expose et critique très concrètement, par des anecdotes, la corruption qui règne dans son pays, la détérioration des systèmes de santé et d’éducation, les restrictions sur les voyages à l’étranger, les files d’attente pour obtenir des aliments de base et la surveillance policière permanente.

Elle n’hésite pas à s’en prendre au culte de la personnalité qui entoure Fidel Castro. Ce dernier, écrit-elle, passe son temps à traiter, dans les médias propagandistes de l’île, «de sujets internationaux centrés sur sa propre personne», tout en réservant une «totale indifférence» aux problèmes de son peuple. Sánchez déplore aussi, du même souffle, «le poids excessif de l’hier sur nos vies». Pendant que les vieux barbus chantent leur gloire du passé, «ceux qui ont moins de 40 ans ont été les acteurs de presque rien; ils ne sont que les simples spectateurs de la gloire des autres, de passifs consommateurs du volumineux répertoire des dates du passé», auxquels on impose une utopie qui n’est pas la leur et dont ils ne récoltent que les fruits taris.

La société cubaine, illustre la blogueuse, est déprimée. Rendue soupçonneuse par le «mouchardage» généralisé qui règne en son sein, elle a fini par établir un lien de causalité entre l’inaction et l’hygiène mentale. Dans un monde où «donner son opinion est le chemin le plus sûr pour s’attirer des ennuis», les gens finissent par se taire. Le surveillant le plus dangereux de tous, écrit Sánchez, est «le policier coercitif que chacun de nous porte en lui, celui qui fait retentir le sifflet de la peur pour nous avertir de ne pas oser et qui agite les menottes de l’indifférence chaque fois que surgissent en nous critiques et opinions».

La blogueuse, elle, a choisi, à ses risques et périls, d’oser, ce qu’Internet, dont elle n’ignore pas les vices, lui permet de faire. Elle n’a pas la prétention d’être une analyste politique. Elle reconnaît «raconter [sa] réalité du point de vue déformé des émotions et du questionnement» et dit de son écriture qu’«elle tient autant de la chronique, de l’exorcisme personnel que du cri». C’est précisément ce caractère intime, très incarné, qui donne son charme et sa force de frappe au propos de Yoani Sánchez. Cuba libre n’est pas une charge de droite contre un régime de gauche. C’est plutôt le chant simple et délicat d’une jeune femme qui souhaite opposer la vérité nue à une propagande épuisée.

Etty et le Mal

Jeune Juive néerlandaise morte à Auschwitz en 1943, Etty Hillesum a laissé un journal qui est considéré, par plusieurs connaisseurs, comme un des documents spirituels les plus importants du XXe siècle. Dans Etty Hillesum. Témoin de Dieu dans l’abîme du mal, le dominicain québécois Yves Bériault présente son parcours, sa pensée et lui rend un hommage bien senti.

Issue d’une famille juive moderne très peu pratiquante, Etty, née en 1914, étudie le droit à Amsterdam et n’est pas à l’abri des problèmes d’ordre affectif. Elle s’adonne à un certain libertinage sexuel avec des hommes beaucoup plus vieux qu’elle et entretient une image négative d’elle-même. En février 1941, sous l’occupation allemande, elle consulte le psychologue Juliue Spier, un jungien aux méthodes thérapeutiques excentriques. L’homme de 55 ans deviendra son ami, son amant, mais surtout son guide vers la foi en un Dieu «à la frontière du judaïsme et du christianisme», selon la formule d’un rabbin.

En mars 1941, Etty commence à écrire son journal, dont la dernière entrée connue est datée du 13 octobre 1942. Elle y raconte son engagement comme aide sociale au camp de Westerbork, un camp de transit où sont internés les Juifs néerlandais avant de prendre le train de la mort. La jeune femme connaît le sort qui est réservé aux siens, qu’elle assiste sans relâche. Cela ne l’empêche pas, malgré tout, de chanter la grandeur de Dieu. «Elle est, écrit Bériault, cette jeune mariée, libre et exubérante, que la rencontre de Dieu a rendue radieuse, virginale, au milieu de ce cloaque de la bêtise humaine qui l’entoure.» Elle n’espère rien d’autre de Dieu que son «action transformatrice [...] au coeur de notre existence». La mort lamentable qui l’attend ne l’ébranle pas.

«Elle est surhumaine, écrit Todorov, mais en même temps inhumaine par son acceptation du mal qui sévit.» Dans la haine et la discorde qui pourrissent nos existences, écrit plutôt Bériault, elle nous prend par la main et nous accompagne en nous murmurant le nom de Dieu à l’oreille. On peut trouver que ça ne suffit pas, tout en reconnaissant la noblesse du parcours.

À retenir

  • Cuba libre 

    • Vivre et écrire à La Havane

    • Yoani Sánchez

    • Traduction de Danièle Cardin et Víctor Mozo

    • Michel Brûlé

    • Montréal, 2010, 304 pages

    • Etty Hillesum 

    • Témoin de Dieu dans l’abîme du mal

    • Yves Bériault

    • Préface de Jean Vanier

    • Médiaspaul

    • Montréal, 2010, 192 pages

56 Réponses à “Yoani dans Le Devoir”

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